Les temps

Publié le 9 Juillet 2020

Les temps

Il y a le temps.

 

Le temps de grandir, le temps de mûrir, le temps de choisir. Le temps de changer d’avis.

 

Pour moi il y a eu le temps de survivre. Je pensais que c’était le temps de réfléchir. Ce n’était que de la survie, simple et bête et indolemment inconsciente de ses propres conséquences. Puis il y a eu le temps de la compréhension.

 

Comprendre que j’étais malade, que ce n’était pas normal, que même si c’était banalisé je devais changer ou y passer.

 

J’ai cru que c’était le temps de guérir. Tout feu tout flamme, j’ai même cru n’avoir besoin de personne, je me suis lancée sur le chemin des bonnes résolutions avec une volonté de fer et une solitude dont je ne percevais pas le poids accablant.

 

L'alliage était-il de piètre qualité ou est-ce la touffeur du parcours qui a eu raison du métal ?

 

Je n’aurais jamais la réponse.

 

J’ai marché, j’ai sué, j’ai pleuré, j'ai dérapé, je me suis relevée, je me suis arrêtée, j’ai cherché des raccourcis et fais des détours, j’ai reculé, j’ai voulu sauter, courir, bondir. Bien trop souvent la crainte de trébucher m’a bloquée.

 

Il y a un temps pour tout.

 

Je suis dans le temps de l’attente. Je n’ai pas le cran de me remettre en marche, j’erre sur mon lopin de chemin qui ressemble furieusement au début de celui sur lequel je croyais avoir avancé. Les mois ont passé, si bien que les environs se sont un peu modifiés, mais ce n’est qu’un leurre, peut-être. Case départ, nouveau croisement, je ne sais, j'ai beau essuyer mes lunettes je ne discerne rien. Je ne compte pas baisser les bras au sens le plus radical du terme. Je sais qu’il y a une vie quelque part, plusieurs, mêmes, mais j'ignore comment débroussailler un sentier qui m’y mènerait.

 

Je suis coincée par l’abattement. Je ne suis pas déprimée, je suis résignée. Je ne peux pas vivre ainsi mais je le fais quand même, à défaut de mieux, à défaut de pouvoir reprendre le bâton de marche, à défaut de croire que cette progression est réellement une progression, non une stagnation, une progression qui me mènera à ce que je ne suis même pas sûre de véritablement chercher, à ce que je ne sais pas que je cherche.

 

Serait-ce de la patience ? Je ne crois pas. Acculée, il ne me reste que la contemplation de l'écoulement temporel. D'autres appelleraient cela de la persévérance. En réalité, mon œil s'est vidé à force de scruter sans voir les étendues solitaires de mon cœur et de mon esprit, qui n'ont plus l'énergie de rien.

Rédigé par Tac

Publié dans #brouillard

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